PP5 s’échappe pour la troisième fois

Vue du Parc National du Djurdjura, Algérie
Parc National du Djurdjura, Algérie

Après s’être “échappé” du domaine pénitentiaire de Bellechasse lors de son départ en migration le 11 septembre, puis avoir échappé de peu à la mort suite à son tir par un braconnier le 16 en Algérie, PP5 vient de démontrer une fois encore ses étonnantes capacités.  Le 11 octobre, le vétérinaire qui avait sauvé sa vie, Toufik Brahimi, s’apprêta à l’examiner et à le peser en vue de son lâcher prévu quelques jours plus tard. Mais PP5 a vu les choses d’un autre œil. Après avoir pincé la main de Mr. Brahimi avec son puissant bec, il a profité de l’effet de surprise pour pousser la porte de la volière et s’en échapper, filant immédiatement haut au-dessus des montagnes du Djurdjura avant de disparaître au loin. Même si nous avions imaginé pour lui un retour à la liberté plus « contrôlé », M. Brahimi nous a rassuré en nous disant qu’il s’était pleinement remis de ses blessures, qu’il avait bien mangé juste avant son évasion et qu’il était très dynamique. Tellement dynamique en fait qu’il n’avait pas du tout envie de passer plus de temps en captivité.

Panneau dans le parc du Djurdjura. On ne saura si PP5 survivra à son aventure que s’il revient en Suisse dans quelques années. Mais comme sa bague plastique bleue portant l’inscription PP5 était endommagée et qu’elle n’a pas pu lui être remise, il sera bien sûr plus difficile à reconnaître. Il est d’ailleurs possible que sa bague plastique ait protégé sa patte d’une blessure car c’est probablement lors du tir qu’elle avait été endommagée. Si un Balbuzard mâle portant uniquement une bague métallique à la patte gauche revient un jour dans notre zone de réintroduction, il pourrait bien s’agir de cet oiseau expert dans l’art de l’évasion.

Excellentes nouvelles du Portugal

Vue du lac d'Alqueva depuis le village de Monsarraz par Landenbergue/Strahm.
Vue du lac d’Alqueva depuis le village de Monsarraz.

La nouvelle vient d’être annoncée qu’un couple de Balbuzards s’est reproduit cette année au lac artificiel d’Alqueva, site du projet portugais de réintroduction de l’espèce. Les oiseaux ont semble-t-il niché juste de l’autre côté de la frontière avec l’Espagne, dans la région d’Estrémadure. Le nid a été repéré depuis un bateau le 19 juillet par le Dr. Luis Palma, qui n’avait toutefois pas pu voir son contenu ni observer d’adultes dans les parages. Le 30 août, Nicolás Durán, garde-faune espagnol, et Isabel Asencio ont vu au même endroit un couple accompagné d’un jeune, signe que le projet portugais avait obtenu son premier succès. Ce projet, toujours en cours, a démarré en 2011. Chaleureuses félicitations à nos collègues et amis portugais pour ce magnifique résultat !

Volières de lâcher avec Andreia Dias et João Ferreira.
Volière d’Alqueva, avec Andreia Dias et João Ferreira.
Andreia Dias, coordinatrice du projet en 2013.
Andreia Dias, coordinatrice du projet en 2013.

PP5 en Algérie

PP5, notre jeune Balbuzard, après son opération.Une nouvelle choquante nous est récemment parvenue d’Algérie à propos d’une de nos jeunes Balbuzards : PP5, surnommé « Tchernobyl » d’après une marque sur sa tête rappelant le symbole de la radioactivité.  Ce mâle avait été tiré par un braconnier dans la région du Parc National de Djurdjura, à environ 100 km à l’est de la capitale du pays, Alger.

PP5 notre jeune Balbuzard et Toufik Brahimi.
PP5 et Toufik Brahimi.

Par chance il est toujours en vie, grâce au vétérinaire du parc, M. Toufik Brahimi, qui l’a opéré et a réussi à retirer deux plombs de carabine de sa poitrine et de la base d’une de ses ailes. M. Brahimi a ensuite contacté la Station ornithologique suisse de Sempach, à partir des inscriptions gravées sur la bague métallique que l’oiseau portait. Nous sommes maintenant en contact direct avec M. Brahimi pour discuter avec lui de la meilleure façon de prendre soin de PP5. Nourri quotidiennement de poisson frais, il semble maintenant en bonne voie de récupération. PP5 avait quitté le site suisse de réintroduction le 11 septembre et a eu la malchance d’être tiré le 16, soit cinq jours après son départ, et après avoir couvert 1.200 km y compris la traversée de la Méditerranée.

Il n’est pas encore possible à ce stade de savoir si PP5 pourra pleinement se rétablir après une telle épreuve, mais l’espoir demeure. Par une étonnante coïncidence, M. Brahimi s’est souvenu de nous avoir rencontré (Denis Landenbergue et Wendy Strahm) lors d’une visite faite au Parc du Djurdjura en 2008. Un raison de plus pour lui – pour autant qu’il en faille une – de faire au mieux pour sauver celui qu’il appelle « notre oiseau ».

Il est bien connu qu’un tiers seulement des jeunes Balbuzards survivent d’habitude jusqu’à l’âge adulte. Les causes possibles de pertes sont multiples : prédation naturelle, mauvais temps en mer, tempêtes de sable dans le désert, collisions avec un véhicule, des câbles ou une ligne électrique, braconnage volontaire ou tir par ignorance, etc.

Nos deux derniers Balbuzards sont partis

PP1 et PP4 sur la volière 9 septembre 2015Le 19 septembre, nos deux derniers jeunes Balbuzards de la saison  de réintroduction 2015  sont partis pour l’Afrique. Ce jour-là, l’équipe du projet a longuement observé PP1 et PP4 (d’après le code de leur bague couleur) avant que la femelle ne s’élève très haut dans le ciel et prenne  le cap vers le sud. Quelques heures plus tard, le mâle a fait de même.  La photo ci-dessus les montre peu avant leur départ, posés sur le toit de leur volière de lâcher. On distingue bien la différence de taille entre PP1, la femelle (à gauche), et PP4, le mâle.  Depuis le 19 septembre, il a fallu attendre encore plusieurs jours avant d’être absolument sûr que l’heure du grand départ avait définitivement sonné.  En effet, c’est un comportement classique chez les jeunes Balbuzards de faire des « faux départs », soit de disparaître pendant deux voire même trois jours, avant de revenir se nourrir au site de lâcher. Maintenant qu’il est certain que PP1 et PP4 sont partis, on leur souhaite bon vent, en espérant qu’ils échapperont aux nombreux risques auxquels est confronté  tout Balbuzard depuis sa naissance.

 

Trois jeunes Balbuzards sur un même nid

Trois Balbuzards sur un nid artificiel 3 septembre 2015Cette photo a été prise peu avant que PP5 n’entreprenne sa migration le 11 septembre. Nous avions construit deux nids devant les volières afin que les jeunes Balbuzards puissent bien les voir et s’habituer à leur proximité, et nous avons été enchantés de constater qu’ils  se perchaient volontiers dessus (bien qu’il soit rare d’en voir trois ensemble sur un même nid).

Vue aerien du nid1 Bellechasse
Le sommet du nid, tel que vu par un oiseau.

En situation naturelle, les nids de Balbuzards sont bien sûr plus épais et comportent beaucoup plus de branches que sur cette photo.  Nous avons construit ces deux  durant le pic des grandes chaleurs de juillet 2015, ce qui a limité le volume de travail qu’on a alors pu faire. Il est d’ores et déjà certain que nous ferons mieux pour 2016 ! Vus depuis leur sommet, ces nids avaient quand-même l’air bien accueillants. Grand merci à Michel Beaud et à Pascal Rapin pour leur aide précieuse lors de leur construction avec Wendy Strahm et Denis Landenbergue, ainsi qu’aux Etablissements de Bellechasse qui ont fabriqué et installé ces plateformes.

Construction du nid1 Michel Beaud et Wendy Strahm
Construction par 40° de température.
Construction de nid2 avec Pascal Rapin
Pascal au pied d’un nid, tel que vu par un oiseau.

Premiers jeunes Balbuzards envolés

Cinq Balbuzards au site de lâcher 15 août 2015Les 8 et 11 août, les six Balbuzards dont nous avions pris le plus grand soin depuis leur arrivée en Suisse ont été relâchés. Certains, comme PP6, ont attendu une heure à peine avant de prendre leur premier vol, alors que d’autres sont restés dans leur cage pendant presque toute la journée avant de finalement s’envoler. Par exemple, on avait commencé à croire que PP4 ne se lancerait jamais, jusqu’à ce qu’à 18h30 il fasse subitement un décollage parfait, pour s’élever haut dans le ciel avant d’effectuer un atterrissage parfait sur le toit de sa volière. C’était comme s’il avait réfléchi à son envol durant toute la journée, tellement il semblait déterminé à en faire du premier coup une belle réussite. A ce stade du projet, les jeunes oiseaux sont nourris deux fois par jour avec des poissons entiers  disposés à leur intention, une première fois juste avant l’aube puis une seconde fois en fin d’après-midi. Ils sont extrêmement sensibles aux dérangements et par conséquent l’équipe du projet  les surveille en permanence.  Il est impératif qu’ils ne soient pas effrayés par quoi que ce soit et qu’ils ne s’éloignent pas du lieu de réintroduction.  Trois arbres morts avaient été “plantés” à leur intention près des volières. La photo ci-dessus a été prise alors que cinq jeunes étaient perchés ensemble.

Comment reconnaître nos oiseaux

Metal and colour Osprey ringsChaque oiseau porte une bague métallique à la patte gauche et une bague plastique bleue à la patte droite. Ces bagues ne blessent aucunement les oiseaux qui les portent et ne les incommodent pas du tout. Elles ne peuvent être posées que par les détenteurs d’un permis de baguage, en l’occurrence Michel Beaud, Adrian Aebischer et Roy Dennis pour ce qui concerne notre projet. La bague métallique est fournie par la Station ornithologique Suisse (SOS) de Sempach et porte un combinaison chiffrée unique. Toute personne qui trouverait un oiseau ainsi bagué peut en informer la SOS qui nous communiquera alors aussitôt les détails de l’observation en question.

Aluminium Osprey rings from Sempach 26jun15
Bagues pour balbuzards

Pour pouvoir lire une bague métallique, il est en principe nécessaire d’avoir l’oiseau en mains. La bague de couleur, plus grande, peut être lue plus facilement au moyen d’un télescope ou d’un téléobjectif d’appareil photo, que l’oiseau soit perché ou parfois même en vol.

La bague plastique de chaque oiseau possède un code unique. En 2015 ces bagues étaient bleues, marquées des lettres blanches PP suivie d’un seul chiffre (PP1, PP2…. jusqu’à PP6) et posées à la patte droite. C’est Roy Dennis qui s’est chargé de les poser en Ecosse, afin que les oiseaux soient immédiatement identifiables au moment de leur entrée en Suisse, et leur numéro ayant préalablement être noté sur les permis d’exportation et d’importation de la CITES.

Des bagues bleues sont également posées à des Balbuzards au Royaume-Uni, mais là-bas elles le sont à la patte gauche et portent des combinaisons de lettres et de chiffres différentes. Par conséquent, si quelqu’un voit un Balbuzard pêcheur portant une bague bleue à la patte droite, il s’agit nécessairement d’un Balbuzard réintroduit en Suisse. Les oiseaux réintroduits en Suisse cette année ont été nommés d’après les lettres et chiffres inscrits sur leur bague bleue.

Lancement du site www.balbuzards.ch

Tete Balbuzard Sylvain Larzillière

Après quatre ans de préparatifs en vue de la réintroduction du Balbuzard en Suisse (un siècle  après sa disparition), nous avons le plaisir de mettre en ligne le site internet www.balbuzards.ch.

Il a principalement pour but de documenter les différentes étapes du projet, tout en proposant aussi quelques nouvelles sur des activités de protection ou études conduites ailleurs sur le Balbuzard. Si tout va bien, nous espérons relâcher les premiers jeunes durant l’été 2015.

En quoi le Balbuzard est-il unique ?

michel_jaussi_balbuzard

  •  C’est le seul rapace diurne à se nourrir uniquement de poisson.

  • Le Balbuzard est la seule espèce appartenant à son genre (Pandion) et à sa famille (Pandionidae), ce qui signifie qu’il est donc très distinct sur le plan taxonomique.

  • En commun avec les hiboux et les chouettes, il est le seul rapace diurne ayant une serre extérieure entièrement réversible, ce qui signifie qu’il peut saisir ses proies avec deux serres devant et deux serres derrière. Une fois capturés, les poissons n’ont aucune chance de s’échapper.

  • La distribution globale d’une même espèce de rapace sur chaque continent (sauf l’Antarctique) est exceptionnelle; seul le faucon pèlerin ayant une distribution plus large parmi les rapaces diurnes. La taxonomie traduit, il est vrai, l’avis du scientifique. Considéré jusqu’à maintenant comme une seule espèce vivant sur tous les continents, certes subdivisée en plusieurs sous-espèces, la science pourrait un jour constater qu’il s’agit en fait d’espèces différentes, ce qui ne changerait rien au fait que tous ont une allure très similaire et la même écologie. Les Balbuzards se trouvent au sommet de la chaîne alimentaire et ils sont d’excellents indicateurs de la santé des écosystèmes aquatiques.

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The Osprey in Switzerland